{Chronique} La maison des reflets

Depuis 2022, les Maisons de départ ressuscitent les morts grâce à des reflets en quatre dimensions qui reproduisent à la perfection le physique, le caractère, et le petit je-ne-sais-quoi qui appartient à chacun. Les visiteurs affluent dans les salons et le parc du manoir Edelweiss, la plus célèbre des Maisons de départ, pour passer du temps avec ceux qu’ils aimaient. Daniel a grandi entre ces murs, ses meilleurs amis sont des reflets. Jusqu’à ce qu’il rencontre Violette, une fille imprévisible et lumineuse… Bien vivante.

Il y a longtemps que je me suis habitué aux allées et venues incessantes, à ce mélange entre espaces privés et publics - je suis né ici, après tout. Mais j'aime quand le jour décline et que les portes de la Maison Edelweiss se referment. Car lorsque la nuit tombe et que les écrans s'éteignent, les lieux changent de visage.

Il y a quelques semaines de ça j'ai été contactée par l'une de mes abonnées qui est actuellement stagiaire chez Syros. Elle m'a proposé un titre de la maison d'édition qui malheureusement ne m'intéressait pas puis elle m'a laissé choisir ce qui pouvait davantage me plaire dans leur catalogue. J'ai jeté mon dévolu sur La maison des reflets, un livre que j'avais repéré lors de sa sortie. 

Daniel est le fils du propriétaire de la plus célèbre des maisons de départ, un établissement qui permet de faire revivre les morts grâce à un ingénieux système de modélisation des disparus en quatre dimensions. Assez introverti et solitaire, Daniel ne quitte que très rarement sa maison et ses seuls amis sont les reflets créés par son père. Le jour où il va bousculer ses habitudes en se rendant à l'extérieur, sa vie va en être bouleversée. 

La maison des reflets est un récit pour la jeunesse qui se lit rapidement tout en abordant les thèmes indémodables de la vie et de la mort qui personnellement m'ont fait réfléchir. Qui peut se targuer de ne pas vouloir passer plus de temps avec ses proches disparus? Un simple reflet peut-il se substituer à une personne en chair et en os? Même si le sujet du deuil est omniprésent, ce roman n'est pas triste pour autant. Il est au contraire pertinent et intelligent. Surmonter le décès d'un proche est une épreuve douloureuse dont il est difficile de venir à bout, on en sait tous quelque chose mais nous naissons pour mourir et le côté philosophique de l'histoire a su me satisfaire.

Ce livre mélancolique et doux nous permet de faire la connaissance de Daniel. Cet adolescent taciturne m'a souvent fait de la peine. Avoir des reflets pour seuls amis n'est pas particulièrement sain et ne fait pas montre d'un bon équilibre général. Je l'ai trouvé d'une naïveté touchante et sa correspondance avec Violette m'a particulièrement plu. Daniel est un personnage qui devient vraiment intéressant dès lors qu'il commence à remettre en question tout ce qu'il a toujours connu.

En ce qui concerne les personnages secondaires, ils n'ont pas vraiment su faire mouche et je ne suis pas sûre de les garder en tête encore longtemps. Le père de Daniel possède un bon fond mais délaisse son fils au profit de son travail et si ce n'est ses quelques rares sursauts paternels, il ne m'a pas touché. La gouvernante de l'adolescent fait preuve d'un bon sens critique et d'une vision réalise des choses mais son caractère bougon et sa maladresse ne m'ont pas plu.

Je déplore également le manque de dynamisme de l'histoire qui reste assez monotone et linéaire. Une cadence plus appuyée aurait largement été préférable. Si certaines révélations m'ont déçu par leur aspect prévisible, d'autres en revanche ont quand même su me satisfaire. 

En résumé, je ressors globalement satisfaite par cette lecture qui aborde sans complexe les sujets du deuil et de la quête d'indépendance à l'adolescence. J'ai apprécié l'originalité et la douceur du récit. Il y a eu certes quelques petites fausses notes mais pas suffisamment pour ternir mon impression générale.

★★★☆☆